6 Septembre 2010
Nous voulons profiter de cette fin d'été 2010 pour faire une belle balade de 3 jours en montagne. Comme monter à plus de 2000 m - à vélo - n'est pas de notre niveau, nous allons faire une exception et faire une randonnée pédestre. L'objectif principal est de rejoindre le refuge de l'Estrop à 2050 m et de s'approcher de la Tête de l'Estrop qui est le plus haut sommet du massif des Trois-Évêchés, dans le département des Alpes-de-Haute-Provence (04). Dominant la Provence de ses 2 961 m d'altitude, cette montagne constitue en quelque sorte une limite climatique entre les grandes Alpes et la Haute-Provence. La Bléone, rivière qui passe par Digne les Bains, prend sa source au pied de la Tête de l'Estrop.
Le refuge de
l'Estrop dans son écrin de montagne
Refuge de l'Estrop (lien sur le site du refuge)
Le Refuge de l'Estrop est un refuge, gardé en été, qui propose un service de restauration d'un très bon niveau, malgrè l'isolement du site. En effet on accède au refuge (y compris pour son gardien) par un sentier balisé après une ascension de 850 m de dénivelé. Nous avons donc profité, il ne faut pas manquer une telle occasion, d'alléger le sac à dos pour une rando de 3 jours. Nous recommandons donc chaudement ce beau refuge !
Premier jour : Remontée de la vallée de la Bléone
Ferme des Hulottes à Jausiers dans l'Ubaye
Avant notre grand départ pour la rando, nous avons également passé une bonne nuit au calme dans la chambre d'hôte "La Ferme des Hulottes" dans la vallée de l'Ubaye. Avec une telle qualité d'hébergement, on aurait envie de rester un mois dans ce lieu magique situé au pied du fameux col de La Bonette-Restefond.
Après le magnifique village de montagne de Prads Haute-Bléone, nous garons notre voiture au parking (comme de nombreux randonneurs) du Lac des Eaux-Chaudes à environ 1200 m d'altitude. Le pic noir, oiseaux des forêts montagnardes, nous accueille de ses cris plaintifs. De là, la piste longe la Bléone jusqu'aux chalets de la Combe. A partir de ces chalets, le sentier devient étroit et escarpé pour monter à la cascade de la Piche. L'ascension est raide, aussi nous mettons la pédale douce. Au lieu des 3 heures annoncées pour atteindre le refuge, nous mettons 4h30 + 1h pour le repas. Les baliseurs du sentier n'ont pas l'option "rando-pépère" dans leur prévisionnel.
La Bléone, un torrent qui prend sa source dans le massif de l'Estrop (La Combe)
Passage aérien dans les gorges de la Bléone (Pas de la Piche)
Le roi des papillons, l'apollon (Parassius apollo) au Jas de la Piche (1800 m)
Le seul passage un peu délicat est le Pas de la Piche, un peu vertigineux. Sans problème par temps sec, cela doit devenir compliqué par temps humide ou avec des névés. Ici, nous nous attardons pour faire des photos d'un grand papillons mythique, l'apollon. Dans les temps anciens, Apollon était aussi considéré comme le dieu protecteur des troupeaux. Les brebis de la vallée auraient bien besoin d'une intervention divine car le loup est bien présent en ce moment autour de l'Estrop. L'apollon est un grand papillon d'une envergure de 35 à 40 mm. Les plantes-hôtes sont essentiellement des plantes succulentes de la famille des Crassulaceae, comme les orpins et les saxifrages. Nous avons de la chance de voir ce beau papillon un 3 septembre, car habituellement la période de vol est de juin à août.
L'arrivée au refuge de l'Estrop est tranquille et nous y passons une bonne nuit réparatrice. Nous y rencontrons le berger qui ce jour là était préoccupé par les attaques répétées du loup. Attirés par les cadavres de moutons, 5 vautours fauves tournoient autour de la Tête de l'Estrop.
Second jour : Du refuge de l'Estrop au refug du Laverq
C'est la grande étape de notre rando : 600 m. de montée et 1200 de descente ! De plus, c'est la partie vraiment montagnarde, car le passage entre la vallée de la Bléone et la vallée du Laverq n'est pas si évident que cela. Le sentier figurant sur la carte IGN est d'ailleurs un peu énigmatique par le Glacier de la Blanche. En fait, il existe un sentier plus facile passant par la Baisse de la Petite-Barre. Fort heureusement le gardien du refuge nous donne cette information très importante pour rejoindre les Eaux-Tortes et ensuite le prochain refuge. C'est plus facile, par temps sec et beau. Attention par mauvais temps, c'est certainement une autre aventure.
Parcours balisé en rouge en direction de la Tête de l'Estrop puis en jaune vers la Baisse de la Petite-Barre ne figurant pas sur la carte IGN (cliquez sur la carte)
Baisse (col) de la Petite Barre à 2735 m d'altitude
Le passage de la Petite Barre nous permet de faire un peu de botanique et l'ornithologie. Nous sommes survolés de près par les vautours fauves, les grands corbeaux, les chocards à bec jaune et le faucon crecerelle. De jolies petites fleurs étonnantes sont présentes dans les marnes pierreuses du col :
- La benoîte rampante qui forme des têtes de poupées. Cette benoîte d’altitude pousse dans les éboulis rocheux. Elle se propage en déployant des stolons.
- La bérardie laineuse qui étale ses grandes feuilles là où rien d'autre ne pousse. Cette plante très prestigieuse a été recherchée et étudiée par de nombreux botanistes. Elle est assez commune
dans le sud des Alpes où elle se rencontre dans les éboulis calcaires et schisteux.
- La Linaire des Alpes qui pousse dans les milieux hostiles et pauvres comme les pierriers. Ses fleurs mauves et oranges empêchent toute confusion. Sa tige et ses feuilles sont bleues-grisâtres.
- L'adénostyle des Alpes : cette adénostyle est carastéristique des éboulis calcaires humides et sous-bois de hêtres et de sapins. Son inflorescence est composée de belles fleurs roses.
Descente spectaculaire dans les marnes vers la vallée du Laverq
L'Adénostyle des Alpes (Adenostyles alpina)
La Linaire des Alpes (Linaria alpina) également appelé muflier des Alpes ou gueule-de-lion des Alpes
Benoîte rampante (Geum reptans)
Bérardie laineuse (Berardia subacaulis) composée archaïque endémique des Alpes sud-occidentales
"Vise" le refuge du Laverq est en bas !
Après une grande descente dans les marnes, où nous croissons 7 chamois, nous arrivons dans la magnifique zone humide d'altitude des Eaux-Tortes. Ce marais est alimenté par le glacier de la Blanche, glacier empierré le plus méridional des Alpes françaises. Pour plus de détails, voir l'inventaire du ministère de l'écologie (ZNIEFF) et la fiche NATURA 2000 du site "Dormillouse-Laverq".
Magnifique zone humide des Eaux Tortes à 2250 m d'altitude
Couple d'Aeschne des Joncs, la seule libellule vue sur les Eaux Tortes en cette fin de saison
Troisième jour : Col de la Séolane
Vallon du Laverq en montant au col de la Séolane
Nous passons la nuit au refuge du Laverq (non-gardé en septembre) : Refuge du Laverq.
Au col de Séolane, nous sommes accompagnés par deux chamois et une espèce rare : le crave à bec rouge. Ce corvidés se distingue de chocard par son cris plus grave et son bec rouge. Les deux espèces ont les pattes rouges.
Le retour à notre voiture laissée à Méolans-Revel se fait tranquillement par le col de la Séolane. A l'arrivée, nous sommes fatigués mais très heureux de cette fantastique balade menée sur un rythme pépère.
Edelweiss (Leontopodium alpinum), étoile d'argent ou pied de lion
Une des plantes emblématiques des Alpes. L’ensemble de la plante est couvert d’une très abondante pilosité blanche. Impossible à confondre avec une autre espèce. Se
rencontre dans les pelouses, rocailles et pâturages, de préférence sur sols calcaires ou schisteux
La vallée de l'Ubaye vue du col de Séolane
Parcours de notre rando de 3 jours en Haute-Provence